
«Heureux Sophocle! Il est mort après une longue vie, homme de chance et de talent; il a fait des tragédies nombreuses
et belles et il a connu une belle fin, sans jamais avoir subi aucun mal.»
—
Phrynichos*
Né en 496 ou 495 avant J.-C., Sophocle est l’auteur de nombreuses tragédies ayant marqué son siècle; il ne se
serait probablement jamais douté que son œuvre traverserait 2500 ans. Selon
Pierre Vidal-Naquet, historien spécialiste de la Grèce antique, «[la] vie [de Sophocle] fut le contraire d’une tragédie.» Il naît au sein d’une famille riche dont le figure patriarcale est propriétaire
d’esclaves forgerons et charpentiers. Son parcours de jeune homme ressemble
à celui des garçons de son âge appartenant à sa classe sociale (une section du présent document sera consacrée à l’éducation
des jeunes hommes Grecs en page 14). Il s’intéresse rapidement à la politique
parallèlement à sa carrière de poète. Car de son temps, on appelait les
auteurs dramatiques des «poètes» si l’on se fie aux écrits d’Aristote à ce sujet.
Au cours de sa vie, il gère, entre autres choses, le trésor athénien versé par les «alliés» d’Athènes (Voire le chapitre «Athènes et ses alliés» dans Le
Ve siècle grec en utilisant les références bibliographiques à
la fin du document). Il se fait également élire stratège* en 440 aux cotés de
son ami Périclès*. Et même s’il finit par occuper des positions importantes
dans la démocratie, son succès politique n’égale en rien sa carrière de poète.
En fait, un autre politicien de son temps, Ion de Chios, déclare à son sujet, quelques années après sa mort, :
« [Sophocle] n’était ni habile ni doué d’initiative [en politique], il était un honnête homme d’Athènes», ce qui laisse supposer, toujours selon M. Vidal-Naquet,
qu’il est «Honnête homme, traduisons riche et ajoutons conformiste.» Il vit à la
frontière de la ville et de la campagne dans le dème* de Colone. Il épouse une
Athénienne mais il fréquente une autre femme qui devient son amante (situation commune pour les citoyens athéniens), ce qui
génére, malheureusement, certains conflits familiaux de légitimité. Selon les
écrits de l’époque, lors des concours tragiques appelés chorégies (décrites ci-dessous), Sophocle remporte vingt-quatre
fois la première ou la deuxième place. Il n’est jamais troisième. Ses prédécesseurs, Eschyle et Euripide, ne ressortent gagnant que treize fois et cinq
fois respectivement. Ces statistiques font de lui un homme respecté, admiré et
aimé par-delà la ville d’Athènes. On raconte même que «les rangs des assiégeants
d’Athènes s’ouvrirent pour laisser passer son convoi mortuaire» en 406 avant
J.-C. Il connut donc l’âge d’or de la Grèce Antique et participa
activement au développement de sa cité tant dans les sphères culturelles que politiques.
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